Le gouvernement fédéral reporte sa réforme tant promise de la Loi sur l’accès à l’information, en demandant plus de temps pour bien faire les choses dans ce projet complexe et ambitieux.
Les libéraux avaient promis de procéder à une première série de modifications législatives d’ici la fin de l’hiver, en attendant une réforme plus globale, en 2018, de la loi adoptée il y a 34 ans — à une époque où régnait le «Commodore 64». Le président du Conseil du Trésor, Scott Brison, responsable de la Loi sur l’accès à l’information, souhaite aussi une révision tous les cinq ans.
Le gouvernement libéral veut notamment accorder plus de pouvoirs au commissaire à l’information du Canada, qui pourrait, comme un tribunal, ordonner au gouvernement la publication de certains documents. Ottawa veut par ailleurs que la Loi sur l’accès à l’information s’applique aussi aux cabinets du premier ministre et des ministres, ainsi qu’aux membres des institutions administratives qui assistent le Parlement et les tribunaux.
Ces modifications sont maintenant reportées à une date indéterminée.
Dans un courriel, un porte-parole de Scott Brison a expliqué que cette réforme est complexe car «elle touche plusieurs enjeux importants et implique tous les ministères et toutes les agences du gouvernement». Jean-Luc Ferland indique que le gouvernement «doit trouver un juste équilibre entre la transparence, d’une part, et d’autres valeurs fondamentales comme l’indépendance du système judiciaire, l’efficacité et la neutralité de la fonction publique, la protection des renseignements personnels des Canadiens et la sécurité nationale».
M. Ferland soutient que le gouvernement est toujours déterminé à aller de l’avant, mais juge essentiel de poser les bons gestes dans ce dossier qui a peu évolué depuis 34 ans.
Scott Brison a apporté l’an dernier par décret ministériel quelques modifications administratives à la loi: il a enchâssé le principe selon lequel tous les ministères sont «ouverts par défaut», il a éliminé tous les frais accessoires mis à part les frais de requête de 5 $, et il a ordonné aux fonctionnaires de remettre les documents demandés sur un support convivial, dans la mesure du possible.
La Loi sur l’accès à l’information permet aux citoyens de demander à peu près tout document du gouvernement — des comptes de dépenses à de la correspondance en passant par des notes internes de hauts fonctionnaires. Les ministères doivent répondre dans un délai de 30 jours, et fournir des explications s’ils ont besoin de plus de temps.
Or, le système canadien est souvent critiqué pour sa lenteur, ses retards technologiques et ses nombreuses failles qui permettent aux fonctionnaires d’éviter la publication de certains documents. La loi n’a jamais vraiment été modifiée depuis son adoption en 1983.
Le report de cette réforme devrait mécontenter les partisans de l’ouverture, à commencer par les délégués à la conférence «Transparence pour le 21e siècle», qui réunit justement à Ottawa cette semaine «des experts et défenseurs canadiens et internationaux de l’accès à l’information, du gouvernement ouvert et de la transparence du gouvernement». C’est d’ailleurs le Commissariat à l’information du Canada qui est l’hôte de cette conférence.