Le drapeau national du Canada, surnommé drapeau canadien ou unifolié, se compose d’un champ rouge au milieu duquel un carré blanc arbore une feuille d’érable rouge stylisée à 11 pointes. Contre toute attente, un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes vote en faveur du drapeau actuel en 1964. Après des mois de débats, le Parlement adopte la version définitive qui est sanctionnée par proclamation royale et devient le drapeau national le 15 février 1965.
Conception
George Stanley, doyen de la faculté des arts au Collège militaire royal du Canada, se démarque comme le principal concepteur du drapeau du Canada. Deux croquis figurent sur une lettre qu’il adresse à John Matheson le 23 mars 1964. L’un est divisé en trois bandes verticales rouge, blanc, rouge de largeur égale et porte au centre une feuille d’érable rouge; l’autre est divisé horizontalement dans les mêmes couleurs et proportions et porte au centre trois feuilles d’érable sur une tige. Come A. Fortescue Duguid, George Stanley affirme que rouge et blanc sont les couleurs du Canada. Il favorise une seule feuille d’érable bien stylisée, un symbole nettement canadien qui évoque l’idée d’unité. Il préconise la simplicité et les symboles traditionnels et recommande d’éviter les emblèmes d’autres pays comme le drapeau de l’Unionet les fleurs de lis. Pour lui, le Red Ensign n’est pas approprié parce que trop compliqué et difficile à reconnaître. La lettre de George Stanley à John Matheson trace la route vers un drapeau national, mais sa vision exigera encore un long cheminement intellectuel et politique.
John Matheson ne rejette pas la proposition de George Stanley, bien qu’elle ne le satisfasse pas entièrement. Un dessin provenant de George Bist, un ancien combattant, ressemble beaucoup à celui d’Alan Beddoe, sauf qu’il arbore au centre une seule feuille d’érable sur un carré, ce qui donne l’espace requise pour agrandir la feuille. John Matheson intègre le carré de George Bist au dessin de George Stanley et le place en douce parmi les autres propositions.
Le comité reçoit quelque 5 900 propositions. Comme en 1945-1946, on voit se multiplier castors, feuilles d’érable, Union Jack, fleurs de lys, lions, étoiles, y compris l’étoile polaire, des symboles religieux et diverses croix et rayures. Aucune de ces compositions ne semble commander le respect dû à un drapeau national. A. J. Casson du Groupe des Sept soumet un drapeau bleu portant un rameau de trois feuilles d’érable rouges lisérées de blanc.
Le drapeau du Canada comporte un aspect unique, un carré blanc au centre pour lequel il n’existe pas de terme héraldique dans le vocabulaire d’alors. Conrad Swan, un officier d’armes canadien au Collège des hérauts d’Angleterre, brise l’impasse en proposant de le nommer « pal canadien » du fait qu’il est deux fois la largeur d’un pal ordinaire (une bande verticale qui occupe un tiers de la surface de l’écu). Depuis, cette expression fait partie de la langue du blason (voir Héraldique). La stylisation de la feuille d’érable exige un travail graphique soigné qui la rend également unique.
La feuille originale stylisée par Alan Beddoe, l’artiste du comité, comprend 13 pointes. John Matheson étudie le comportement d’un modèle d’une feuille de l’érable à sucre qu’il fait ballotter dans le vent du tunnel aérodynamique du laboratoire du Conseil national de recherches. Finalement, il choisit une feuille à 11 pointes et supervise sa stylisation par Jacques Saint-Cyr, graphiste à la Commission des expositions du gouvernement canadien. La précision du travail est telle que lorsque les proportions et la forme de la feuille ne sont pas respectées, comme il arrive, le drapeau perd beaucoup de sa beauté et de son impact visuel. Vu ses talents de couturière, Joan O’Malley se charge de créer un prototype en tissu pour présentation au premier ministre. Yvonne Diceman, artiste et calligraphe, prépare le texte enluminé de la proclamation royale sur vélin (peau de veau) que lui procure Alan Beddoe.
La Proclamation du drapeau national du Canada
Héritage
Dès les débuts du XIXe siècle, les anglophones comme les francophones reconnaissent la feuille d’érable comme emblème canadien. On la célèbre en poésie, chansons, sur des pièces de monnaie, des médailles, des drapeaux et en imagerie populaire comme des cartes postales. Sur le drapeau, la feuille d’érable représente tous les Canadiens, ce qui sans doute donne un nouvel élan à la fleur de lys comme emblème national des francophones du Québec et d’ailleurs. (Voir aussi le drapeau franco-ontarien.)
En 1996, le 15 février est déclaré Jour du drapeau national du Canada. Cette date commémore le jour du déploiement du drapeau sur la Colline du Parlement. On célèbre cette journée de plusieurs façons à la grandeur du pays, même si ce n’est pas un jour férié national.
Certaines manières d’arborer le drapeau paraissent anodines, par exemple : le peindre sur son visage à des événements sportifs et fêtes nationales ou le placer sur son sac à dos par patriotisme en voyageant. Pendant le débat sur le drapeau, de nombreuses caricatures se moquent du point de vue de l’opposition, ce qui semble légitime, mais volontairement profaner un drapeau est blessant et de mauvais goût. On pardonne plus facilement les erreurs. Lorsque les Marines portent le drapeau canadien renversé avant la seconde partie de la Série mondiale entre Toronto et Atlanta en 1992, les Torontois ripostent avec humour à la rencontre suivante en brandissant des pancartes inscrites « No hard feelings » [Sans rancune] en lettres renversées. À la fête du Canada en 1999, les Governor General‘s FootGuards portent le drapeau à nouveau avec la feuille pointant vers le bas.
Un protocole écrit règlemente l’usage du drapeau. Plusieurs de ces règlements font appel au bon sens : ne pas lui donner une fonction utilitaire comme une nappe; ne pas y ajouter d’autres éléments, même pas des signatures.